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montagne qui regarde l’océan, et de l’océan qui contemple la montagne.

Avec un guide comme le mien, on passe d’un ravissement à un autre, et quand on s’endort c’est pour rêver encore de ce que l’on a tant admiré dans le jour.

J’ai l’impression que l’âme de Percé se révèle encore mieux dans la beauté fragile de la saison à son déclin, dans les lumières atténuées et la beauté fantastique de ses coloris, comme aussi dans les brouillards qui après avoir étendu leur voile délicat sur les sommets, courent comme les esprits sur la plaine, cachant clochers, maisonnettes et passants, confondant les lignes, comme des metteurs en scène d’une fantasmagorie.

Le silence du village, la solitude des grèves, le grand vent qui se plaint dans les pins, les vagues dont la chute brisée ne cesse pas, le capricieux éclat du soleil que tant de lourds nuages éteignent subitement, composent ensemble un accord profond, triste et doux qui atteint le fond de l’âme : toutes les descriptions, les reproductions, ce que l’on en dit ou ce que l’on voudrait écrire est plat comparé à la réalité, et je me reproche cet essai !

Ici il ne faut pas écrire, mais ouvrir le oreilles et les yeux et toute son âme attentive, afin de ne rien perdre de cette grande beauté qui se prodigue.

Je faisais cette déclaration à mon amie, dans le jour finissant, pendant que nous lon-