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Quelques-unes sont achevées, épanouies, comme les beaux nénuphars que la brise indolente balance au-dessus de l’eau ; il en est d’incomplètes qu’on laisse flotter avec paresse à fleur d’esprit et dont on aime le murmure vague, sans chercher à en bien saisir le sens. Et tant d’autres qui germent mystérieusement au fond de notre esprit et qui lentement s’y forment… les jours passeront, et de l’eau lourde qui les recouvre, les pensées sortiront, un jour, claires, vivantes, fleurs à leur tour.

C’est une des grandes joies de la vie, cette étrange élaboration de la pensée humaine toujours à la recherche de l’inconnu, et l’appel incessant de l’inconnu nous faisant signe de le suivre. C’est ce qui fait que la vie ne peut jamais être monotone et ennuyeuse pour ceux qui sont conscients de cette activité de l’esprit. Que nous nous tournions vers la nature ou vers les âmes, toujours nous trouverons des merveilles insoupçonnées, des parcelles de la Grande Beauté répandue avec tant de prodigalité dans le monde.

Je me souviens du temps où je disais étourdiment : cette fleur est laide ; cette personne est méchante !

Je ne trouve plus aucune fleur laide : elles sont toutes des miracles de délicatesse, et il n’y a pas d’âme où l’on ne puisse trouver de la bonté, si on sait l’y voir. Vivre en découvrant la beauté dans toutes les choses et