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Le jour, tout est lumière et splendeur, mais les soirées sont tristes malgré le nombre et la clarté des étoiles. Les montagnes se dressent sombres et tragiques au-dessus du petit lac profond et les feuilles, peureuses, frissonnent dans le vent, dont les longues plaintes montent et descendent lamentablement. Ce grand silence des soirs où, seul, le vent élève la voix, est très impressionnant. Dès neuf heures, la dernière lumière du village s’éteint ; vous avez l’impression de veiller seule dans la nuit et la tristesse douce, celle que vous aimez, veille avec vous ; elle est venue, chargée du souvenir de toutes les beautés que vous possédiez et qui vous ont été enlevées, comme les feuilles d’automne, dans toute leur grâce attachante.

Aimons le silence et la tristesse des soirs solitaires, ils sont bienfaisants pourvu que s’y mêle le "petit brin de confiance” dont parle si joliment Madame de Sévigné.

Ce joli brin de confiance, ne nous le laissons jamais enlever : gardons-le jusqu’au seuil de la porte qui s’ouvrira pour nous sur l’autre monde où tous nos espoirs seront réasisés.

Il faut nous en fleurir, afin que les autres, le voyant si vivant et robuste, même dans la tempête, même dans le frimas, nous demandent où, eux aussi, pourraient le cueillir. C’est en le leur expliquant que nous devenons pour eux une bénédiction. Ceux qui allaient se désespérer voient leur erreur, ceux