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IROQUOISIE

des prix. Deux grandes nations européennes apprennent donc vite que la guerre entre Algonquins et Hurons d’une part, et Iroquois d’autre part, est plus favorable à leurs intérêts que la paix, car alors chacune peut garder dans les limites de ses colonies les pelleteries qui y sont produites et les payer le prix qu’elles veulent. De là à la désirer, à la fomenter, à l’entretenir, à intriguer contre les traités de paix, il n’y a qu’un pas.

Il ne s’agit pas de vaines paroles. On ne sait pas exactement à quelle date, par exemple, les Algonquins ont commencé de fréquenter Fort Orange. Mais en 1626, un Hollandais y enregistre leur passage : « Les tribus qui, du côté du Nord, viennent des lieux les plus éloignés, sont les Indiens du Canada français »[1]. Ne se rendent-ils là que depuis la paix de 1624 ? Les Mohicans sont leurs amis et ils les laissent sans doute passer librement.

Des débats se continuent entre historiens sur la quantité des fourrures canadiennes qui, dès le début, ont passé par l’Hudson ; cependant, les renseignements précis manquent. D’autre part, un mouvement commercial en sens inverse se produit aussi à la même époque. D’après Chrestien Le Clerq, des Iroquois apportent des pelleteries en Nouvelle-France en 1624 ; d’autres faits se produiront plus tard et révéleront un commerce clandestin qui peut avoir de l’ampleur. L’Iroquoisie n’a pas alors épuisé ses réserves de fourrures. Ces incidents avaient attiré peu d’attention tout d’abord ; puis les historiens se sont aperçus que les tribus indiennes avaient de grandes relations commerciales avant l’arrivée des blancs ; que le cuivre, les grains de nacre, les pierres de flèches circulaient, par exemple, dans tout le continent. Ils ont noté alors que les indigènes avaient compris rapidement le mécanisme de la traite, de la concurrence, des échanges, les bénéfices des intermédiaires et tous les autres phénomènes relatifs au commerce.

Mais il faut bien noter qu’en conformité d’une politique prudente, les Agniers ne veulent pas en 1624 combattre deux ennemis à la fois : la puissante coa-

  1. Narratives of New-Netherland, p. 86.