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CH. ii, DESCRIPTION DE SYÈNE

avaient elles-mêmes subi un pareil sort. C’est ainsi qu’à Syène, plus que partout ailleurs, on voit se succéder les peuples et les âges divers ; chaque peuple, chaque génération, a laissé des traces de son existence ou de son passage ; et ce mélange confus offre un chaos à l’œil, un aliment à la curiosité, un champ vaste à la méditation.

À la ville arabe a succédé la ville moderne, que l’on croit bâtie du temps de Selym. Son emplacement est plus à l’est et dans un fond ; elle est entourée, au nord-est, d’un bois de dattiers, et de jardins qui s’étendent très-loin sur une plage basse, marécageuse après l’inondation ; au midi est la montagne, escarpée et toute remplie de carrières ; au levant, un grand espace occupé par des maisons rasées jusqu’au sol : la longueur de la ville est d’environ huit cents mètres ou quatre cents toises. C’est en terre que sont généralement bâties les maisons de la ville : on remarque dans beaucoup de maisons des voûtes au lieu de planchers, et ces voûtes n’ont qu’un seul rang de briques ; ce qui n’empêche pas qu’elles ne subsistent très-long-temps.

Le port où s’arrêtent les barques du Kaire est assez vaste, et fermé d’un côté par des écueils. Les habitans font principalement le commerce des dattes ; on envoie ces fruits au Kaire, avec le séné qui vient du pays supérieur, et qu’on transporte en barque jusqu’aux cataractes, puis de là jusqu’à Syène à dos de chameau. Le commerce de dattes est assez considérable pour faire subsister la ville : cependant la misère des habitans y paraît grande ; la plupart marchent presque sans vêtemens,