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DE L’ÎLE DE PHILÆ.

pias, qu’on a surnommée gigantea, dont les fruits sont sphériques et vésiculeux et de quatre pouces de grosseur, très-commune dans les sables d’Ombos, dans les déserts du Fayoum et dans tous les lieux très-arides ; l’autre est une espèce d’acacia de la hauteur de cinq à six pieds, remarquable par ses belles fleurs violettes, par ses globes de fruits velus et d’un jaune doré, surtout par la propriété sensitive dont il jouit à un très-haut degré. Dès que l’on en touche une branche, les pinnules des feuilles se rapprochent à l’instant, puis les feuilles s’abaissent, enfin tout le rameau s’incline : il faut plusieurs minutes pour que la branche reprenne son premier état ; elle se relève lentement, ensuite ses feuilles se redressent, et les folioles se rouvrent[1]. Les habitans connaissent très-bien cette propriété singulière ; mais ils l’attribuent à une influence magique. J’ai entendu l’un d’eux qui, en touchant l’arbrisseau, lui adressait ces paroles d’un ton fort grave : Yâ chagar el-habâs, yâ kell mangé, yâ kell fâs (Habâs est le nom de la plante). Tels sont les mots sacrés qui doivent produire le phénomène[2].

Je viens de conduire le lecteur à travers la ville des Arabes, et j’ai dit que la ville antique avait presque entièrement disparu sous les constructions du premier siècle de l’islamisme. Ces dernières, à leur tour, se sont écroulées et n’offrent plus que des débris. Déjà celles des Romains, bâties sur les ruines de la ville égyptienne,

  1. C’est la même plante que Bruce appelle Ergett el-Krone, et qu’il a trouvée en Abyssinie (voyez la pl. 7 de l’atlas du Voyage de Bruce).
  2. J’ai communiqué cette phrase arabe à M. Raige, qui a bien voulu m’en donner l’orthographe. Les premiers mots veulent dire, Ô arbre abyssinien ; ce qui est une expression juste : le reste n’a pas un sens relatif à la propriété de l’arbrisseau.