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408 ŒUVRES D’EMILE DESCHAMPS. duits sur le bel instrument des Racine et des Boileau. Parmi les plus heureuses littératures étrangères qui aient paru de nos jours, les connaisseurs ont distingué les Romances du Cid, publiées en vers français par M. Creuzé de Lesser. La seconde édition que nous annonçons de cette charmante production ne porte pas de nom d’auteur; mais quand bien même on ne se rap- pellerait pas quel nom était en tête de la première, M. Creuzé-de-Lesser a mis trop de grâce et d’esprit dans toutes ces romances pour qu’il ait pu s’attendre à un bien strict incognito. Qu’a-t-on besoin de signer ses lettres quand on ne déguise pas son écriture? « Les Romances du Cid, comme le dit M. de Lesser dans son excellente préface, sont, après Don Quichotte, ce que les Espagnols nous ont donné de plus remar- quable en littérature. Peu de livres, ajoute-t-il, m’ont fait une aussi vive impression : elle le fut d’autant plus que je m’y attendais moins. J’étais comme un homme qui en cherchant un coquillage vient de découvrir un trésor. De ce moment, je formai le projet de dégager cet. or si pur du sable qui le cache quelquefois, et d’offrir à ma patrie une imitation des Romances du Cid; production d’autant plus singulière qu’elle est le fruit de plusieurs siècles et le travail de plusieurs hommes étranges; étrange Iliade qui n’a point d’Homère; créa- tion admirable de je ne sais combien d’Alcées et de Pin- dares inconiTus! Elle porte seulement l’empreinte géné- rale du génie espagnol; et aussi lorsqu’on demande qui a fait les Romances sur le Cid, tout ce qu’on peut répondre de raisonnable est que ce sont les Espa- gnols. » LesRomancesduCidsont deces ouvrages qui peuvent déplaire à certains esprits, mais qui ne plairont jamais médiocrement; on ne les lira pas jusqu’à la fin, ou il faut les relire dix fois. Il faut les détester à moins qu’on ne les adore, et elles sont à l’abri de ce froid éloge, de ce fatal c’est bien ! qui exprime d’une manière si juste l’admiration et l’indifférence. Yoici quelques citations qui vaudront mieux pour M. de Lesser et pour nos lecteurs, que tous les éloges