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inconnu, et sur cette partie si intéressante de la vie du philosophe, nous en sommes réduits à des conjectures.

Nous savons à peu près ce qu’il fit en 1618-1619, grâce à la découverte récente (en 1905) d’un journal manuscrit d’Isaac Beeckman[1]. Mais pour les années qui précèdent, nous n’avons en tout que quatre documents : deux actes de baptême, où René Descartes signa comme témoin, à Sucé, diocèse de Nantes, le 22 octobre et le 3 décembre 1617 ; attestation de baccalauréat et de licence en droit, à Poitiers, 9 et 10 novembre 1616 ; un baptême encore où il fut parrain, dans cette même ville, le 21 mai de cette même année. C’en est assez pour rectifier sur certains points le récit de Baillet, et pour le compléter. D’abord il fait partir son héros pour la Hollande en mai 1617 : Descartes ne partit que l'année suivante, sans doute l’été de 1618, puisqu’on le retrouve en France, et même en Bretagne, jusqu’à la fin de 1617. En outre, Baillet qui fait résider le jeune philosophe à Paris, de 1613 à 1617, ignorait les séjours à Sucé, tout au moins l’automne de 1617, et à Poitiers l’année 1616. Nous ne sommes même pas certains que Descartes demeura à Paris les trois années 1615, 1614 et 1613. Baillet l’assure, mais n’en donne point de preuves. Lui d’ordinaire si soigneux de citer ses témoignages, n’en cite qu’un seul pour tout ce chapitre, et à propos d’une anecdote qui semble bien être le double d’un épisode, celui-là authentique, survenu dix à douze ans plus tard : disparition du philosophe, pour échapper aux importuns et aux fâcheux, et étudier en liberté. Descartes se serait caché à tous ses amis, dans une maison du faubourg Saint-Germain, deux années entières : quelle apparence[2] ! L’auteur de l’anecdote est un

  1. Tome X, p. 17-39.
  2. Baillet, après avoir parlé du départ de Mersenne, l’avent de 1614, continue ainsi :

    « Cette ſéparation toucha M. Deſcarte aſſez vivement. Mais au lieu de luy donner la penſée de retourner à ſes divertiſſemens & à ſon oiſiveté, elle le fit encore mieux rentrer en luy même, que la préſence de ſon vertueux ami, & luy inſpira la réſolution de ſe retirer du grand monde.