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482 Vie de Descartes.

retraite où il se confinait, était toujours disposé à rendre ser- vice. Il ne refusait à personne son assistance, soit scientifique, comme on vient devoir, soit même judiciaire. Sans craindre de se compromettre lui-même, il prit un jour la défense de ses deux amis Bannius et Bloemaert, inquiétés comme prêtres catholiques ; il s'adressait, il est vrai, à un esprit non moins libre que le sien, son grand ami Huygens^ Dans une autre circonstance fort curieuse, on a de lui une lettre en faveur d'un paysan, un pauvre homme coupable d'un meurtre. La victime, aussi peu intéressante que possible, était le second mari de la mère de cet homme ; celle-ci d'ailleurs s'en était séparée, après en avoir été outrageusement battue ; mais il continuait de la menacer, elle et ses enfants. Les parents du mort avaient eux-mêmes pardonné dès le premier jour au meurtrier; et les magistrats d'Egmond, jugeant sur place et en pleine connaissance de cause, avaient prononcé l'acquittement. Mais leur arrêt un peu précipité avait un vice de forme : il fut cassé par la juridiction supérieure, à La Haye, où le paysan fut cité à comparaître. Il se crut perdu, et prit la fuite; aussitôt fut-il condamné par défaut. C'est la défense de ce pauvre homme, un aubergiste, « notre voisin », dit Des- cartes, qu'il entreprit à la prière de la femme restée seule avec deux petits enfants. Il écrivit donc, en décembre 1646 et janvier 1647, ^ ^^^ amis de La Haye, et paraît avoir obtenu tout ce qu'on pouvait obtenir : non pas la grâce entière, mais comme adoucissement, la remise de la confiscation, ce qui permettait à la femme de conserver l'auberge et de gagner sa vie et celle de sa famille. Descartes n'avait pas recouru, pour plaider cette cause, à son savoir déjà lointain de licencié en droit de Poitiers : il parle, comme nous dirions aujourd'hui,

a. Tome II, p. 583-586.

b. Tome V, p. 262-265. Lettre qui n'est i "vs '■^i à sa place, et qui doit être replacée à la fin de 1646, t. IV. p. 591, comme l'indique la lettre du 5 janvier 1647, à Jan van Foreest, t. X, p. 6i3-6i5. Voir, pour ce curieux épisode de la vie de Descartes en Hollande, l'éclaircissement de cette dernière lettre, ibid., p. 6i5-6i7.

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