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A ceux qui ne voulaient point du mouvement de la terre, il s’efforcera de prouver qu’elle ne se meut point, au sens où l’on entend l’expression « se mouvoir », Mais, d’autre part, comment serait-elle immobile, lorsque rien en ce monde ne l’est absolument ? Par de telles considérations il pense habituer peu à peu les esprits à admettre un système, qui, ainsi présenté, peut faire illusion, et ôter tout scrupule aux théologiens.

La troisième partie des Principes est intitulée « Du Monde visible » ; elle traite, en réalité, de ce qui se voit dans le Ciel. Descartes commence par une brève description ou, comme il dit, une « histoire » des phénomènes, c’est-à-dire des apparences célestes ; il résume à ce sujet les observations des astronomes, et y joint leurs hypothèses pour rendre compte des mouvements des planètes[1]. Puis il explique, au moyen de suppositions qui lui sont propres, la formation du Monde, c’est-à-dire en particulier du Soleil et des Étoiles fixes, des Comètes et des Planètes.

Les apparences célestes n’ont rien d’absolu. Nous en jugeons comme habitants de la Terre, en considérant de là le Soleil et les Étoiles, et tout le Firmament. Mais que l’observateur se transporte par la pensée dans la Planète la plus lointaine, Jupiter ou même Saturne[2] : quelles apparences auront alors à ses yeux le Soleil, et la Terre, et l’ensemble des Cieux ? Le Soleil ne sera plus qu’une Étoile fixe ; et la Terre, à peine visible, une petite Planète. La Terre et le Soleil ont été jusqu’ici comme les deux personnages principaux, et qui accaparaient toute l’attention, les deux protagonistes dans cette grande épopée de la création du monde. Descartes les fait, si l’on ose dire, rentrer dans le rang : le Soleil n’est plus qu’une unité dans l’armée innombrable des Étoiles, et de

  1. Cette première partie, sorte d’introduction, va de l’art. iv à l’art. xli inclus. Tome VIII, p. 81-98 ; ou t. IX (2e partie), p. 104-122.
  2. Tome VIII, p. 82-83 ; ou t. IX (2e partie), p. 106 : art. viii.