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n’était rien moins qu’une révolution. La philosophie ne consiste plus à s’élever des choses visibles aux choses invisibles, du monde à Dieu, la métaphysique étant comme un degré supérieur, au-dessus duquel on ne trouverait plus que la science suprême ou la théologie. La philosophie est simplement l’explication du monde au moyen de principes que la métaphysique est appelée à garantir ; celle-ci est donc comme le point de départ nécessaire, pour passer aussitôt à la physique. Sans aller jusqu’à dire que, de parti pris, elle se détourne de la théologie, ce n’est pas cependant cette haute connaissance qu’elle a surtout en vue ; elle vise presque uniquement et exclusivement la science de la nature, et son but principal est de fournir à celle-ci les principes dont elle a besoin.

Nous retrouverons donc, dans la première partie des Principes, ce qui avait déjà fait l’objet des Méditations, et Descartes l’intitule à dessein « Principes de la connaissance ». L’ordre même n’est changé que sur un point : la preuve de l’existence de Dieu par son essence n’est plus la troisième, mais la première, comme la plus intuitive. Les deux autres ne viennent qu’ensuite : preuve de Dieu par son idée dans notre esprit ; et preuve de Dieu par l’existence de notre esprit avec une telle idée en lui[1]. La comparaison prise de l’idée d’une machine artificielle, laquelle idée a besoin d’une cause qui l’explique, ne figurait que dans les Réponses aux Objections, et non point dans les Méditations : Descartes l’introduit dans les Principes[2]. Pour tout le reste, l’ordre suivi est à peu près le même. On retrouve notamment cette correspondance que nous avons signalée entre la fin et le commencement : de part et d’autre, c’est la question de l’erreur, non pas en général (la

  1. Tome VIII, p. 10-13 : art. xiv, xv et xvi (première preuve) ; art. xvii, xviii et xix (deuxième) : art. xx et xxi (troisième). Tome IX (2e partie), p. 31-34.
  2. Tome VIII, p. 11, et t. IX (2e partiel). p. 32 : art. xvii. Voir t. VII, p. 1033, l. 19, à p. 104, l. 16 : et t. IX (1re partie), p. 84. Déjà Descartes avait indiqué cette comparaison dans la Synopſis de ses Méditations : t. VII, p. 14, l. 26. à p. 15. l. 2.