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tion ; et le grand Huygens eut tort de croire aussi là-dessus trop facilement, de la part de Descartes, à un emprunt, sinon un plagiat. Comment Hortensius aurait-il su de Snellius une chose que le successeur de celui-ci, et qui détenait ses papiers, ignora jusqu’en novembre 1632 ? Or, Descartes était en possession de sa loi, non seulement depuis la fin de 1631, mais dès 1627, à Paris, avant de venir s’installer en Hollande. Sans doute, il était venu autrefois en ce pays, pendant quelques mois de 1618 à 1619. Mais la découverte de Snellius ne paraît pas antérieure à 1626, puisque Golius, qui le quitta cette année pour ne plus le revoir, n’en avait pas connaissance encore. Bien mieux. Descartes, lors de son premier voyage en Hollande, entrevoyait déjà la cause des réfractions, comme on peut le deviner à ses notes de 1619. Il parle, en effet, de la différence de matière entre les corps que le rayon lumineux traverse, en passant, par exemple, de l’air dans l’eau, ou dans le verre, ou dans différents liquides ou solides. Descartes n’insiste pas sur cette idée, à laquelle il revient, sans insister davantage, dans la Dioptrique[1]. Ce n’était plus là de la science, ou de la physique toute simple, mais déjà de la métaphysique ; on dépassait la région positive des faits et de leurs lois, pour pénétrer jusqu’aux principes ; et ceux-ci, notre philosophe avait résolu de ne pas les publier encore.

En effet, son premier chapitre, fondement de tous les autres, et qu’il intitule De la lumière, ne donne pas ce que semblait promettre ce titre, à savoir « la nature de la lumière » : seules les propriétés de celle-ci y sont expliquées, et encore au moyen de comparaisons[2]. Tantôt, c’est la balle du jeu de paume : suivant qu’elle est lancée contre un corps dur, ou bien mou, ou bien liquide, un mur, une toile, ou de l’eau, et qu’elle le rencontre plus ou moins obliquement, elle se réfléchit, et l’angle

  1. Tome X, p. 242, l. 9, à p. 243, l. 2, et p. 293, l. 22-24. Voir aussi t. VI, p. 103, l. 7-30.
  2. Tome VI, p. 83, l. 14-19. Les trois comparaisons qui suivent, se trouvent p. 83-86, p. 86-88 et p. 88-93.