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cecy, eſt que, voyant tous les iours de plus en plus le retardement que ſouffre le deſſein que i’ay de m’inſtruire, a cauſe d’vne infinité d’experiences dont i’ay beſoin, & qu’il eſt impoſſible que ie face ſans l’ayde d’autruy, bien que ie ne me flatte pas tant que d’eſperer que le public prene grande part en mes intereſts, toutefois ie ne veux pas auſſy me defaillir tant a moy-meſme, que de donner ſuiet a ceux qui me ſuruiuront, de me reprocher quelque iour, que i’euſſe pû leur laiſſer pluſieurs choſes beaucoup meilleures que ie n’auray fait, ſi ie n’euſſe point trop negligé de leur faire entendre en quoy ils pouuoient contribuer a mes deſſeins.

Et i’ay penſé qu’il m’eſtoit ayſé de choiſir quelques matieres, qui, ſans eſtre ſuietes a beaucoup de controuerſes, ny m’obliger a declarer dauantage de mes principes que ie ne deſire, ne lairroient pas de faire voir aſſez clairement ce que ie puis, ou ne puis pas, dans les ſciences. En quoy ie ne ſçaurois dire ſi i’ay reuſſi, & ie ne veux point preuenir les iugemens de perſonne, en parlant moy-meſme de mes eſcrits ; mais ie ſeray bien ayſe qu’on les examine, & affin qu’on en ait d’autant plus d’occaſion, ie ſupplie tous ceux qui auront quelques obiections a y faire, de prendre la peine de les enuoyer a mon libraire, par lequel en eſtant auerti, ie taſcheray d’y ioindre ma reſponſe en meſme tems ; & par ce moyen les lecteurs, voyant enſemble l’vn & l’autre, iugeront d’autant plus ayſement de la verité. Car ie ne promets pas d’y faire iamais de longues reſponſes, mais ſeulement d’auouër mes fautes fort franchement, ſi ie les connois, ou