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142 OEuvres de Descartes. 63-64


en même temps en leurs vrais lieux par l’entremise de l’autre œil RST, ils sembleront doubles. En même façon que, touchant la petite boule G des deux doigts A et D croisés l’un sur l’autre, on en pense toucher deux, à cause que, pendant que ces doigts se retiennent l’un l’autre ainsi croisés, les muscles de chacun d’eux tendent à les écarter, A vers C et D vers F, au moyen de quoi les parties du cerveau, d’où viennent les nerfs qui sont insérés en ces muscles, se trouvent disposées en la façon qui est requise pour faire qu’ils semblent être A vers B et D vers E, et par conséquent y toucher deux diverses boules H et I. De plus, à cause que nous sommes accoutumés de juger que les impressions qui meuvent notre vue viennent des lieux vers lesquels nous devons regarder pour les sentir, quand il arrive qu’elles viennent d’ailleurs, nous y pouvons facilement être trompés ; comme ceux qui ont les yeux infectés de la jaunisse, ou bien qui regardent au travers d’un verre jaune, ou qui sont enfermés dans une chambre où il n’entre aucune lumière que par de tels verres, attribuent cette couleur à tous les corps qu’ils regardent. Et celui qui est dans la chambre obscure, que j’ai tantôt décrite[1], attribue au corps blanc RST les couleurs des objets VXY, à cause que c’est seulement vers lui qu’il dresse sa vue, Et les yeux A,B,C,D,E,F voyant les objets T,V,X,Y,Z,U, au travers des verres N,0,P, et dans les miroirs Q,R,S, les jugent être aux points G,H,I,K,L,M ;

  1. a. « Voir la figure en la page 6l. « (P. l39 ci-avant.)