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La Dioptrique. — Discours VI. 135


stituée de la nature pour faire non seulement que l’âme connaisse en quel endroit est chaque partie du corps qu’elle anime au respect de toutes les autres, mais aussi qu’elle puisse transférer de là son attention à tous les lieux contenus dans les lignes droites qu’on peut imaginer être tirées de l’extrémité de chacune de ces parties et prolongées à l’infini.

Comme lorsque l'aveugle, dont nous avons déjà tant parlé ci-dessus, tourne sa main A vers E, ou C aussi vers E, les nerfs insérés en cette main causent un certain changement en son cerveau qui donne moyen à son âme de connaître non seulement le lieu A ou C, mais aussi tous les autres qui sont en la ligne droite AE ou CE, en sorte qu’elle peut porter son attention jusqu’aux objets B et D, et déterminer les lieux où ils sont, sans connaître pour cela ni penser aucunement à ceux où sont ses deux mains. Et ainsi, lorsque notre œil ou notre tête se tourne vers quelque côté, notre âme, en est avertie par le changement que les nerfs, insérés dans les muscles qui servent à ces mouvements, causent en notre cerveau.

Comme ici, en l’œil RST[18], il faut penser que la situation du petit filet du nerf optique, qui est au point R, ou S, ou T, est suivie d’une autre certaine situation de la partie du cerveau 7, ou 8, ou 9, qui fait que l’âme peut connaître tous les lieux qui sont en la ligne RV, ou SX, ou TY ; de façon que vous ne devez pas trouver étrange que les objets puissent être vus en leur vraie situation,