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��Préfaces de Clerselier. (8-9)

��» ceuoir noftre Ame & fes Fonctions. Mais fi l'on confidere que » noftre imagination n'eft pas propre à reprefenter toutes fortes de » choies, mais feulement celles qui font corporelles, ainfi que la » peinture ne peut pas reprefenter toutes fortes de chofes corpo- » relies, mais feuleftient celles qui font vifibles; & par confequent » que c'eft autant d'erreur de vouloir imaginer nos âmes, que de » vouloir voir des fons ou des odeurs dans vn- tableau; on pourra » ayfément fe fatisfaire, en confiderant que, comme c'eft affez apper- » ceuoir les fons que de les ouïr, & les odeurs que de les fentir, » encore qu'on ne les voye pas, c'eft aufll allez entendre la Nature » de noftre Ame, que de connoiftre qu'elle eft le fujet ou la » fubftance en laquelle font toutes nos penfées, encore qu'on ne » puiffe aucunement imaginer cette fubftance; car on ne peut » douter que nos penfées n'ayent quelque fujet dans lequel elles » foient, ny penfer que ce fujet foit le corps, d'autant que l'on ne » reconnoift aucune affinité entre elles & luy. »

« Mais en voilà allez pour le deflein que i'ay eu de faciliter l'in- » telligence de quelques lettres. Ceux à qui le peu que ie viens de » dire, aura fait venir l'enuie d'en fçauoir dauantage, pourront fe » fatisfaire en lifant à fonds les Ecrits de noftre Autheur; c'eft là, » & non dans vne Préface, qu'ils doiuent pleinement s'inftruire; » c'eft à cette fource qu'ils doiuent fe defalterer; & ie croiray auoir » beaucoup fait, fi ie puis feulement irriter la foif de quelque cu- » rieux, & l'obliger, par la iedure de ce liure, de recourir aux » autres. Au refte, que le Lefteur m'excufe, fi i'en ay difi"eré l'im- » preflTion plus qu'il n'auroit fouhaité; & qu'il fçache que ie I'ay » fait pour la commodité & la fatisfadion de tout le monde. En » voicy la caufe. Les Libraires m'ont témoigné que le grand » nombre de Lettres Latines [ qu'il y auoit dans ie premier Volume, » auoit efté caufe que plufieurs perfonnes, qui n'ont point de com- » merce auec cette langue, ne l'auoient pas acheté, & mefme auoit » fait croire à quelques-vns que le plus beau du liure leur eftoit » caché. I'ay voulu pouruoir à cela; et en mefme temps, iettant les » yeux fur vne perfonne qui me touche de fort prés, que i'auois » deffein d'introduire dans cette Science & d'exercer aufli en la » Verfion du Latin, ie luy ay donné vne bonne partie de ces lettres » à traduire, & c'eft ce qui en a retardé l'édition. le ne pretens pas n par là m'excufer des fautes qui pourroient s'y eftre gliffées ; » i'auouë que ie me fuis toufiours referué le droit de reueuë; mais » il eft vray auffi que, pour donner à ce ieune tradudleur quelque » fatisfadion de fon trauail, i'ay lailfé la plufpart de fes expreflions,

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