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49° Correspondance.

» complaisance pour M. Chanut, que M. WeuUes entrât. [£"« marge: » Lettr. MS. de WeuU. à Pison.] Après s'être entretenus pendant quelque » têms sur la nature du mal et le genre du remède, le Médecin conclud » pour la saignée : mais le malade, qui n'étoit convenu de rien avec luy, » s'obstina toujours à rejetter cette opération, alléguant que la saignée » abrège nos jours, et qu'il avoit vécu quarante ans en santé sans la faire. » Le quatrième jour se passa dans les mêmes difficultez, sans que ni » M. Weulles, ni les autres Médecins, que la Reine, inquiète de ce qu'on » luy avoit rapporté la veille, y avoit envoyez, osassent se montrer. [Kn » marge : Lettr. MS. de Chanut à Picot, etc.] L'esprit du malade se trou- » vant de plus en plus embarrassé, dans un cerveau qui étoit tout en feu, » n'étoit plus en état de se servir de sa raison ; et dés que l'on parloit » de le saigner, son aversion luy faisoit dire : Messieurs, épargne:^ le sang » français. M. Weulles [en marge : Weul. ut supr. Rèlat. de la Salle. » Rèlat. de Piq.], qui depuis quatre mois n'avoit jamais échappé une oc- » casion de le contredire suivant la résolution qu'il avoit prise d'abord » de le perdre auprès de la Reine, n'avoit pas sans doute intention de le » tuer en cet état; mais aussi jura-t-il qu'il ne le guèriroit pas malgré luy » [en marge :\Weul[. ibid., invittim qui servat, idemfacit occidenii\. Et il » se peut faire que le malade, mal satisfait de son peu de complaisance, » l'ait dispensé de revenir, et luy ait dit, hors des intervalles de sa raison, n que, s'il devait mourir, il mourrait avec plus de contentement, s'il ne le » voyait point. Mais M. Weulles, qui s'en otfença, étoit indigne de sa pro- » fession, s'il ignoroit que les injures d'un Malade ne sont jamais des » injures pour un Médecin, surtout lorsqu'elles partent d'un transport » qui se fait au cerveau. »

« Cependant M. Chanut [en marge: Lettr. MS. de Chanut du ii Fé- » vrier i65o], voyant que le malade n'avoit pas l'esprit libre pour déférer » à ses prières et à ses raisons, qui tendoient, comme celles des Médecins, » à luy faire tirer du sang, mourait de déplaisir, pour me servir de ses » termes, de voir son pauvre amy tellement obstiné dans son erreur. » Quoiqu'il fût encore luy-même dans un très-mauvais état, il ne laissait » pas de se traîner fort souvent à sa chambre pour le conjurer de ne se » pas croire luy-même, et de permettre qu'on le secourût, tandis qu'il en » étoit têms. Mais le cerveau étant toujours occupé de la fièvre, jamais il » ne se laissa vaincre; et sans vouloir s'imaginer qu'il fût aussi mal que » les Médecins le jugeoient, il se contenta de dire [en marge: Weulles » ibid.] qu'il falloit attendre que le mal vint en maturité, pour délibérer » sur leurs moyens. Durant toutes ces difficultez la Reine soutfroit tou- » jours avec impatience, et elle ne manquoit point d'envoyer deux fois le » jour sçavoir des nouvelles de sa santé [en marge : Chanut ibid.]. Sur la s fin du cinquième jour l'embrasement s'accrut tellement dans le poumon, » que la maladie fut jugée dès-lors incurable. Cependant les Médecins, » que la Reine envoyoit toujours avec des ordres nouveaux, ne laissoient » pas de s'assembler chez M. l'Ambassadeur; mais ils n'osoient paroître

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