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4^0 Correspondance. i, i47-i4S-

efprit, ie n'ay pas craint que cela luy donnaft aucune ialoufie, comme ie m'ailure auffi que V. A. n'en fçau- roit auoir, de ce que ie luy écris librement mes fenti- mens de cette Reine. Elle.eft extrêmement portée à l'étude des lettres ; mais, pource que ie ne fçache 5 point qu'elle ait encore rien veu de la Philofophie, ie ne puis iuger du gouft qu'elle y prendra, ny û elle y pourra employer du temps, ny par confequent fi ie feray capable de luy donner quelque fatisfadion, & de luy eltre vtile en quelque chofe. Cette grande lo ardeur qu'elle a pour la connoilîance des lettres, l'incite fur tout maintenant à cultiuer la langue Grecque*, & àramaiïer beaucoup de liures anciens; mais peut-eflre que cela changera. Et quand il ne changeroit pas, la vertu que ie remarque en cette i5 PrincelTe, m'obligera toufiours de préférer l'vtilité de fon feruice au defir de luy plaire ; en forte que cela ne m'empefchera pas de luy dire franchement mes Xentimens ; & s'ils manquent de luy eftre agréables, ce que ie ne penfe pas, l'en tireray au moins cet 20 auantage que i'auray fatisfait à mon deuoir, & que cela me donnera occafion de pouuoir d'autant plu- tofl retourner en ma folitude, hors de laquelle il eft difficile que ie puiffe rien auancer en la recherche de la vérité ; & c'eft en cela que confifte mon prin- 25 cipal bien en cette vie. Monfieur Fr(einshemius) a fait trouuer bon à fa Maieflé que ie naille iamais au Chafteau. qu'aux heures qu'il luv plaira de me donner pour auoir Ihonneur de luy parler ; ainfi ic n'auray pas beaucoup de peine à. faire ma cour, & cela 3o sacommode fort à mon humeur. Apres tout néant-

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