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128 Correspondance. 111,639-640.

vous pas que vous eftes moins afluré de la prefence des obiets que vous voyez, que de la vérité de cette propofition" : le penfe, donc iefuis? Or cette connoif- fance n'eft point vn ouurage de voflre raifonnement, nv vne inftrudion que vos maiftres vous ayent don- 5 née; voflre efprit la voit, la fent & la manie; & quoy que vôtre imagination, qui fe mêle importunément dans vos penfées, en diminué la clarté, la voulant re- ueftir de fes figures, elle vous eft pourtant vne preuue de la capacité de nos âmes à receuoir de Dieu vne 10 connoilTance intuitiue.

Il me femble voir que vous auez pris occafion de douter, fur l'opinion que vous auez que la connoif- fance intuitiue de Dieu eft celle où Ton connoift Dieu par luv-mefme. Et, fur ce fondement, vous auez bafty i5 ce raifonnement : ie connois que Dieu eft vn, parce que ie connois qu'il eft vn Eftre necelTaire; or cette forme de connoiftre ne fe fert que de Dieu mefme ; donc ie connois que Dieu eft vn, par luy-mefme; &l par confequent ie connois intuitiuement que Dieu 20 eft vn.

le ne penfe pas qu'il foit befoin d'vn grand examen pour détruire ce difcours. Vous voyez bien que con- noiftre Dieu par foy-mefme, c'eft-à-dire par vne il- luftration immédiate j de la Diuinité fur noftre efprit, 25 comme on l'entend par la connoiiï'ance intuitiue, eft bien autre chofe que fe feruir de Dieu mefme pour en faire vne induction d'vn attribut à l'autre; ou, pour parler plus conuenablement, fe feruir de la connoif- fance naturelle (& par confequent vn peu obfcure, du 3o

a. Clers.: proportion.

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