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I jo Correspondance. i, 126-127.

fceu eftre arriué pource qu'on penfoit le deuoir enuoyer\ par mer & qu'on en attendoit roccafion), ie regrette de n'auoir pas employé ce temps-là pour tafcher d'é- crire quelque chofe qui fuft moins indigne d'vn fi bon accueil. Car, encore que i'aye tafché de faire mon 5 mieux, toutesfois les fécondes penfées ont coutume d'eflre plus nettes que les premières, & ie m'eftois haflé en faifant cette dépefche, pour témoigner, au moins par ma promptitude, combien i'eftois defireux d'obéir a vn commandement, que ie cheriffois comme 10 le plus grand honneur que ie puiffe receuoir. Voila, M(onfieur), tous les fuiets de triftelîe que ie puilîe imaginer, afin de modérer l'extrême ioye que i'ay d'aprendre que cette grande Reine veuille lire & con- fiderer à loifir les écrits que i'ay enuoyez. Car i'ofe i5 me promettre que, fi elle goufi:e les penfees qu'ils con- tiennent, elles ne | feront pas infrudueufes, & pource qu'elle eft l'vne des plus importantes perfonnes de la terre, que cela mefme peut n'eftre pas inutile au pu- blic. Il me femble auoir trouué par expérience que la 20 confideration de ces penfées fortifie l'efprit en l'exer- cice de la vertu, & qu'elle fert plus à nous rendre heureux, qu'aucune autre chofe qui foit au monde. Mais il n'eft pas poffible que ie les aye alfez bien ex- primées, pour faire qu'elles paroilTent aux autres 25 comme à moy . Et i'ay vn defir extrême d'aprendre quel iugement en fera fa Maiefté, mais particulièrement auffi quel fera le voftre. La parole a beaucoup plus de force pour perfùader que l'écriture, & ie ne doute point que vous ne luy en faffiez ayfément auoir les 3o mefmes fentimens que vous aurez, au moins s'ils font

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