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Principes. — Quatriesme Partie. 319

��201. Qu'il ejî certain que les corps fenjibles font compofe:{ de parties infenfibles.

On dira peut-eftre que je confidere plufieurs parties en chaque corps qui font Ji petites qu'elles ne peuuent eftre ienties ; & je fçay bien que cela ne fera pas approuué par ceux qui prennent leurs fens pour la mefure des choies qui fe peuuent connoiftre. Mais c'eji, ce me femble, faire grand tort au i-aifonnement humain, de ne vouloir pas qu'il aille plus loin que les jeux; & il n'y a perlbnne qui puiiie douter qu'il n'y ait des corps qui font fi petits, qu'ils ne peuuent eftre apperceus par aucun de nos fens, pourueu feulement qu'il confi- dere quels font les corps qui font adjouftez à chaque/o/s aux chofcs qui s'augmentent continuellement peu à peu, & quels Ibnt ceux qui font oftez des chofes qui diminuent en me/me façon. On voit tous les jours croiftre lesphvites, & il eft impofiible de conceuoir com- ment elles deuiennent plus grandes qu'elles n'ont efié, fi on ne conçoit que quelque corps eft adjoufté au leur : mais qui eft-ce qui a jamais pu remarquer, par l'entremife des fens, quels ibnt les petits corps qui font adjouftez | en chaque moment à chaque partie ci'vne plante qui croift? Pour le moins, entre les Philofophes, ceux qui auouent que les parties de la quantité ibnt diuifibles à l'infiny, doiuent auouer qu't'« fe diuifant elles peuuent deuenir fi petites qu'elles ne feront aucunement fenfibles. Et la raifon qui nous em- pefche de pouuoir fentir les corps qui font fort petits ejl éuidente : car elle confifte en ce que tous les objets que nous fentons doiuent mouuoir qiielques-rnes des parties de nojîre corps qui feruent^ d'or- ganes aux fens, c'efl à dire quelques petits filets de nos nerfs, & que, chacun de ces petits filets ayant quelque grolleur..., les corps qui ibnt beaucoup plus petits qu'eux n'ont point lu force de les mou- uoir, PJ\nï\, eflant affure-^ que chacun des corps que nous fentons efî compofé de plufieurs autres corps f petits que nous ne les fçaiirions apperceuoir, il n'y a, ce me femble, perfonne, pourueu qu'il vueille vier de raifon, qui ne doiue auouer que c'eft beaucoup mieux philo- fopher, de juger de ce qui arriue en ces petits corps, que leur feule petitefl"e nous empefche de pouuoir fentir, par l'exemple de ce que nous voyons arriuer en ceux... que nous lentons, & de rendre raifon, par ce moyen, de tout ce qui eft en la nature, ainfi que fay tafchè de faire en ce Iraitté, que, pour rendre railbn des mefmes | chofes, en 477 inuenter je ne fçay quelles autres qui n'ont aucun rapport auec celles que nous fentons, comme font la matière première, les formes

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