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Principes, — Seconde Partie. 79

nous verrons que deux corps qui le touchent immédiatement feront tranfportez, l'vn d'vn cofté & l'autre d'vn autre, & feront récipro- quement feparez, nous ne ferons point difficulté de dire qu'il y a tout autant de mouuement en l'vn comme en l'autre. J'aduouë qu'en cela nous nous éloignerons beaucoup de la façon de parler qui eft en vfage : car, comme nous fommes fur la terre, & que nous penfons qu'elle eft en repos, bien que nous voyons que quelques vnes de fes parties, qui touchent d'autres corps plus petits, font tranfportées du voifmage de ces corps, nous n'entendons pas pour cela qu'elle foit meue.

3o. D'où vient que le mouuement quijepare deux corps qui Je touchent, ejî plujlojl attribué à l'vn qu'à l'autre.

...Pource que nous penfons qu'vn corps ne fe meut point, s'il ne fe meut tout entier, & que nous ne fçaurions nous perfuader que la terre fe meuue tout entière, de cela feul que quelques vnes de fes parties font tranfportées du voifmage de quelques autres corps plus petits qui les touchent; dont la raifon eft que nous remarquons ibuuent auprès de nous plufieurs tels tranfports qui font contraires les vns aux autres : car fi nous fuppofons, par exemple, que le corps EFGH foit la terre, & qu'en mefme temps | que... le corps AB eft 87 tranfporté de E vers F, le corps CD foit tranfporté de H vers G, bien que nous fçachions que les parties de la terre qui touchent le corps AB font tranfportées de B vers A, & que l'adlion qui fert à ce transport n'eft point d'autre nature, ni moindre, dans les parties de la terre, que dans celles du corps AB, nous ne dirons pas que la terre fe meuue de B vers A, ou bien de l'occident vers l'orient, à caufe que, celles de les parties qui touchent le corps CD eftant tranf- portées en mefme forte de C vers D, il faudroit dire auffi qu'elle fe meut vers le cofté oppofé, à fçauoir du leuant au couchant, & il y auroit en cela trop d'embarras. C'eft pourquoy... nous nous conten- terons de dire que les corps AB & CD, & autres femblables, fe meuuent, & non pas la terre. Mais cependant nous nous fouuien- drons que tout ce qu'il y a de réel... dans les corps qui fe meuuent, en vertu de quoy nous difons qu'ils fe meuuent, fe trouve pareille- ment en ceux qui les touchent, quoy que nous les confiderions comme en repos ".

a. Voir Correspondance, t. V, p. 70, p. 385, et p. 403, 1. 25.

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