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Principes. — Seconde Partie. 69

qu'ils ne difl'erent entr'eux que comme la nature du genre ou de l'efpece diffère de la nature de l'indiuidu, fi, pour mieux difcerner quelle eil la véritable idée que nous auons du corps, nous prenons pour exemple vne pierre & en citons tout ce que nous fçaurons ne point appartenir à la nature du corps. Oftons en donc premièrement la dureté, pource que, fi on reduifoit cette pierre... en poudre, elle n'auroit plus de dureté, & ne laifferoit pas pour cela d'eil:re vn corps ; oitons en aufii la couleur, pource que nous auons pu voir quelque fois des pierres fi tranfparentes qu'elles n'auoient point de couleur; oitons en la pelanteur, pource que nous voyons que le feu, quoy qu'il Ibit | tres-leger, ne laifle pas d'eftre vn corps; ollons en 74 le froid, la chaleur, & toutes les autres qualitez de ce genre, pource que nous ne penibns point qu'elles foient dans la pierre, ou bien que cette pierre change de nature parce qu'elle nous femble taniojî chaude & tanlojt froide. Apres auoir ainfi examiné cette pierre, nous trouuerons que la véritable idée que nous en auons confilte en cela feul que nous appefceuons dijtinâement qu'elle ell vue Jubjlance ellenduë en longueur, largeur & profondeur : or cela mefme eft compris en Tidée que nous auons de l'ei'pace, non feulement de celuy qui eft plein de corps, mais encore de celuy qu'on appelle vuide.

12. Et en quel fens il eft différent.

Il ell vray qu'il y a de la différence en noftre façon de penfer; car 'i^i on a oité vne pierre de l'efpace ou du lieu où elle eitoit, nous en- tendons qu'on en a oité l'eltenduë de cette pierre, pource que nous les jugeons... inleparables l'vne de l'autre : & toutefois nous penfons que la mefme eitenduc du lieu où eftoit cette pierre eil demeurée, nonobltant que le lieu qu'elle occupoit auparauant ait efté rempli de bois, ou d'eau, ou d'air, ou de quelque autre corps, ou que mefme il pareille vuide, pource que nous prenons l'effenduë en gênerai, & qu'il nous femble que la mefme peut eftre commune aux pierres, au bois, à l'eau, à l'air, &. à tous les au|tres corps, & aulli 72 au vuide, s'il y en a, pourueu qu'elle foit de mefme grandeur, de mefme figure qu'auparauant, & qu'elle conferue vne mefme fituation à l'égard des corps de dehors qui déterminent cet efpace.

i3. Ce que c'eft que le lieu extérieur.

Dont la railbn ell que les mots de lieu & d'cfpace ne fignitïent rien qui diffère veritahlemeiit du corps que nous difons effre en

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