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Principes. — Première Partie. 51

droit, la différence vniuerfelle par où les triangles reftangles dif- férent de tous les autres. De plus, fi nous remarquons que le quarré du collé qui fourtend' l'angle droit eft égal aux quarrez des deux autres coftez, & que cette propriété conuient feulement à cette efpece de triangles, nous la pourrons nommer propriété vniuerfelle des triangles redangles. Enfin fi nous fuppofons que, de ces triangles, les vns fe meuuent & que les autres ne fe meuuent point, nous prendrons cela pour vn accident vniuerfel en ces triangles. Et c'eit ainfi qu'on compte ordinairement cinq vniuerfaux, à fçauoir le genre, l'efpece, la différence, le propre, & l'accident.

60. Des dijlinaions, & premièrement de celle qui eft réelle.

Pour ce qui eff du nombre que nous remarquons dans les chofes mefmes, il vient de | la diftindion qui efl entr'elles : & il y a des diftinaions de trois fortes, à fçauoir, réelle, modale, & de raifon, ou bien qui fe fait de lapenfée. La réelle fe trouue proprement. . . entre deux ou plufieurs fubrtances. Car nous pouuons conclure que deux fubftances font réellement diflinftes l'vne de l'autre, de cela feul que nous en pouuons conceuoir vne clairement & diftindement fans penfer à l'autre; pource que, fuiuant ce que nous connoiffons de Dieu, nous fommes affeurez qu'il peut faire tout ce dont nous auons vne idée claire & diftinae. C'efl pourquoy, de ce que nous auons maintenant l'idée, par exemple, d'vne fubftance eftenduë ou corpo- relle, bien que nous ne fçachions pas encore certainement fi vne telle chofe eft à prefent dans le monde, neantmoins, pource que nous en auons l'idée, nous pouuons conclure qu'elle peut eflre ; & qu'en cas qu'elle exifte, quelque partie que nous puifiions déter- miner de la penfée, doit eftre diftinae réellement de fes autres par- ties. De mefme, pource qu'vn chacun de nous apperçoit en foy qu'il penfe, & qu'il peut en penfant exclure de foy ou de fou ame toute autre fubftance ou qui penfe ou qui eft eftenduë, nous pouuons conclure aufïï qu'vn chacun de nous ainfi confideré eft réellement diftina de toute autre fubftance qui penfe, & | de toute fubftance corporelle. Et quand Dieu mefme joindroit fi eftroitement vn corps à vne ame, qu'il fuft impoffible de les vnir dauantage, & feroit vn compofé de ces deux fubftances ainfi vnies, nous conceuons auffi çz/ 'elles demeureroient toutes deux réellement diftinaes, nonobftant cette vnion; pource que, quelque liaifon que Dieu ait mis entr'elles,

a. « Souftant » (inédit.).

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