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��Œuvres de Descartes. 226-227.

��qu'on ne lui attribue rien de ce qui apartient à l'elprit. Et ie n'aurois rien adiouté dauantage pour prouuer que l'efprit eft réellement diftingué du corps, d'autant que vulgairement nous iugeons que toutes les chofes l'ont en effecl, & félon la vérité, telles qu'elles paroiflent à noftre penfée.

Mais, d'autant qu'entre ces doutes h3'perboliques que i'ay pro- poiez dans ma première Méditation, cetuy-cy en eftoit vn,à fçauoir, que ie ne pouuois eftre alfuré que les chofes fujfeiit en effeQ, & félon la vérité, telles que nous les conceuons, tandis que ie fupolbis que ie ne connoiliois pas l'auteur de mon origine, tout ce que i'ay dit de Dieu & de la vérité, dans la 3,4 & 5 Méditation, fert à cette conclu- lion de la réelle dillinftion de Vefprit d'auec le corps, laquelle enfin i'ay acheuée dans la fixiéme.

\Ie couçof fort bien, dit Monfieur Arnauld, la nature du triangle

301 infcril dans le demj'-cercle, fans que ie \ fçache que lequaré de fa ba\e efl égal aux quarei des cofte:[. A quoy ie répons que ce triangle peut véritablement eltre conceu, fans que l'on penle à la proportion qui efl. entre le quaré de la baze & les quarez de fes collez, mais qu'on ne peut pas conceuoir que cette proportion doiue efl;re niée de ce triangle, c'elt à dire qu'elle n'apartienne point à la nature de ce triangle ; & qu'il n'en efl; pas ainfi de l'efprit ; pource que non feu- lement nous conceuons qu'il eft fans le corps, mais auffi nous pou- uons nier qu'aucune des chofes qui apartiennent au corps, apar- tienne à l'efprit ; car c'eft le propre & la nature des fubftances de s'exclure mutuellement l'vne l'autre.

Et ce que Monfieur Arnauld a adiouté ne m'eft aucunement con- traire, à fçauoir que ce n'efi pas merueilleft, lorfque de ce que ie penfe ie viens à conclure que iefuis, l'idée que de là ie forme de moy-mefme, me reprefenle feulement comme vue chofe qui penfe. Car, de la mefme façon, lorfque l'examine la nature du corps, ie ne trouue rien en elle qui relfente la penfée ; & on ne fçauroit auoir vn plus fort argument de la diftinc^ion de deux chofes, que lorique, venant à les confiderer toutes deux féparement, nous ne trouuorîs aucune chofe dans l'vne qui ne foit entièrement différente de ce qui le retrouue en l'autre.

le ne voy pas aufll pourquoy cet argument femble prouuer trop ; carie ne penfe pas que, pour montrer qu'vne chofe eft réellement

302 diftinfte d'vne autre, on | puifle rien dire de moins, finon que par la toute-puilfance de Dieu elle en peut eftre feparée ; & il m'a femblé que i'auois pris garde affez foigneufement à ce que perfonne ne puft pour cela penfer que l'homme n'e/t rien qu'vn efprit vfant oufeferuant du corps.

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