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88 OEuvREs DE Descartes. no-ni,

dans fon idée, nous l'ayons reconnue fi pleine & fi abondante, qu'en eftecl elle foit la caufe pourquoy il eft & ne ceffe point d'eftre, & qu'il n'y en puilTe auoir d'autre que celle-là, nous difons que Dieu eûparfoj% non plus negatiuement, mais au contraire tres- pofitiuement. Car, encore qu'il ne foit pas befoin de dire {qu'il eft la caufe efficiente de foy-mefme, de peur quepeut-eftre on n'entre en difpute du mot, neantmoins, parce que nous voyons que ce qui fait qu'il eft par foy, ou qu'il n'a point de caufe différente de foy-mefme, ne procède pas du néant, mais de la réelle & véritable immenfité de fa puiflance, il nous eft tout à fait loifible de penfer qu'il fait en quelque façon la mefme chofe à l'efgard de foy-mefme, que la caufe efficiente à l'efgard de fon effed, & partant, qu'il eft par foy pofitiue- ment. Il eft aufll loifible à vn chacun de s'interroger foy-mefme, fçauoir fi en ce mefme fens il eft par foy, & lorfqu'il ne trouue en foy aucune puiflance capable de le conferuer feulement vn moment, il conclut auec raifon qu'il eft par vn autre, & mefme par vn autre qui eft par foy, pource qu'eftant icy queftion du temps prefent, & 142 non point du pafte ou du futur, le progrez ne | peut pas eftre conti- nué à l'mfiny. Voire mefme i'adjoufteray icy de plus (ce que neant- moins ie n'ay point écrit ailleurs), qu'on ne peut pas feulement aller iufqu'à vne féconde caufe, pource que celle qui a tant de puilTance que de conferuer vne chofe qui eft hors de foy, fe conferue à plus forte raifon foy-mefme par fa propre puilîance, & ainfi elle eft par foy".

Maintenant, lorfqu'on dit que toute limitation eft par vne caufe, ie penfe, à la vérité, qu'on entend vne chofe vraye, mais qu'on ne

a. Le paragraphe ajouté, dont il est question au tome VI, p. 1 1 1, note b, ne se trouve point dans la traduction de 1647 (/« édit.), mais seulement dans celle de 1 66 1 (2' édit.) et les suivantes II n'a donc pas été vu par Des- cartes, et serait tout entier de Clerselier. Nous le donnons cependant ici, à titre de document : « Et, pour preuenir icy vne obiedtion que l'on pou- » roit faire, à fçauoir que peut-ellre celuy qui s'interroge ainfi foy-mefme » a la puilVance de fe conferuer fans qu'il s'en apperçoiue, ie dis que cela » ne peut eftre, & que iï cette puiffance eftoit en luy, il en auroit necelfai- » rement connoilfance ; car, comme il ne fe confidere en ce moment que » comme vne chofe qui penfe, rien ne peut eftre en luy dont il n'ait ou » ne puilfe auoir connoiflance, à caufe que toutes les adions d'vn efprit » (comme feroit celle de fe conferuer foy-mefme, li elle procedoit de luy) » eftant des penfées, & partant eftant prefentes & connues à l'efprit, celle- » là, comme les autres, luy feroit auffi prefente & connue, & par elle il » viendroit necelTairement à connoiftre la faculté qui la produiroit, toute » adion nous menant necelïairement à la connoilfance de la faculté qui la » produit. »

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