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284 Correspondance. i, io-=o.

contentement ne confifte qu'au tefmoignage intérieur que nous auons d'auoir quelque perfedion. Ainfy nous ne fçaurions iamais pratiquer aucune vertu (c'eft a dire faire ce que noftre raifon nous perfuade j que nous deuons faire), que nous n'en receuions de la 5 fatisfadion & du plaifir. Mais il y a deux fortes de plaifirs : les vns qui apartienent a l'efprit feul, & les autres qui apartienent a l'homme, c'eft a dire a l'ef- prit en tant qu'il eft vni au cors ; & ces derniers, fe prefentant confufement a l'imagination, paroiiTent 10 fouuent beaucoup plus grans qu'ils ne font, princi- palement auant qu'on les pofTede, ce qui eft la fource de tous les maux & de toutes les erreurs de la vie. Car, félon la règle de la raifon, chafque plaifir fe de- uroit mefurer par la grandeur de la perfedion qui le i5 produit, & c'eft ainfy que nous mefurons ceux dont les caufes nous font clairement conneues. Mais fou- uent la paffion nous fait croyre certaines chofes beau- coup meilleures & plus defirables qu'elles ne font; puis, quand nous auons pris bien de la peine a les îo acquérir, & perdu cependant l'occafion de pofleder d'autres biens plus véritables, la iouiflance nous en fait connoiftre les defaux, & de la vienent les dédains, les regrets & les repentirs. C'eft pourquoy le vray office de la raifon eft d'examiner la iufte valeur de i5 tous les biens dont l'acquifition femble dépendre en quelque façon de noftre conduite, affin que nous ne manquions iamais d'employer tous nos foins a taf- cher de nous procurer ceux qui font, en effed, les plus defirables ; en quoy, fi la fortune soppofe a nos 3o 3-5 sans parenthèse. — 23 & omis.

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