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Viens ranimer le cœur séché de nostalgie,
Le prendre, et l’inonder d’une fraîche énergie.
En sortant d’abreuver l’herbe de nos guérets,
Viens, ne fût-ce qu’une heure, abreuver mes regrets !

Amène avec ton bruit une de nos abeilles
Dont l’essaim, quoique absent, bourdonne en mes oreilles,
Elle en parle toujours ! diront-ils… Mais, mon Dieu,
Jeune, on a tant aimé ces parcelles de feu !

Ces gouttes de soleil dans notre azur qui brille,
Dansant sur le tableau lointain de la famille,
Visiteuses des bleds où logent tant de fleurs,
Miel qui vole émané des célestes chaleurs !

J’en ai tant vu passer dans l’enclos de mon père
Qu’il en fourmille au fond de tout ce que j’espère ;
Sur toi dont l’eau rapide a délecté mes jours,
Et m’a fait cette voix qui soupire toujours.

Dans ce poignant amour que je m’efforce à rendre,
Dont j’ai souffert longtemps avant de le comprendre,
Comme d’un pâle enfant on berce le souci,
Ruisseau, tu me rendrais ce qui me manque ici.