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SARAH.

tristes regards retombaient sur vous, et s’y attachaient. Vous jouiez près d’elle quand elle vous disait adieu.

« Le soleil va s’éteindre, me dit-elle un soir, porte-moi sous ses derniers rayons : » je l’y portai. Sa tête pesante se releva ; son corps, anéanti la veille, semblait échapper à mes bras qui l’entouraient ; un sourire courut sur ses lèvres entr’ouvertes ; ce sourire m’arracha des larmes, parce que je voyais bien que c’était le dernier. Son ame, alors tranquille comme le jour qui finissait, se réunit à sa fuyante lumière ; ses yeux s’agrandirent en brillant d’une vive lueur ; tout-à-coup cette lueur s’éteignit ; et je cachai ma tête dans la poussière. »

Un cri sortit du sein de Sarah. Le pauvre Arsène s’arrêta quelques instans ; un souvenir déchirant l’empêchait de poursuivre ; ils pleurèrent. Mais le nègre, songeant tout-à-coup