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MARIE.

Les routes inégales qu’il suivait, reculèrent le but de son voyage ; de lourds nuages couvraient les journées, et ôtaient aux nuits leur fraîcheur salutaire. Un soir, égaré du chemin, excédé de fatigue, il s’arrêta au pied d’une cabane, n’osant y frapper si tard : un banc de gazon, qui se trouvait à la porte, lui servit de lit ; il attendait impatiemment l’heure où les bergers vont aux champs, pour leur demander et reprendre sa route, lorsqu’il entendit ouvrir une fenêtre de la cabane. L’obscurité couvrait encore la vallée et les maisons ; mais il distingua les voix de deux femmes qui causaient ainsi entre elles :

« Peux-tu dormir, paresseuse bergère !
Dans ton laitage a-t-on mis des pavots ?
Éveille-toi ! l’alouette légère
Chante le jour et l’heure des travaux. »

« Non, non, ma sœur, ce n’est point l’alouette ;
Elle sommeille avec son chant d’amour :
C’est un berger dont la tendre musette
Durant la nuit te fait rêver au jour. »