Page:Desbordes-Valmore - Les Veillées des Antilles, tome 1, 1821.pdf/125

Cette page a été validée par deux contributeurs.
114
LUCETTE.

a besoin de courir dans l’herbe fraîche.

Lucette se déshabilla, et ce fut alors qu’elle vit tomber de sa collerette les œillets placés là dans sa distraction ; son regard craintif chercha celui de sa mère, qui, voyant ce bouquet s’échapper de son sein, lui dit : Ramasse-le donc, Lucette ; tu n’as pas plus de soin de tes bouquets que de ta chèvre. Ces œillets sont beaux, et les jeter dès qu’ils sont cueillis, n’est pas d’un bon cœur. Hélas ! comment donc faire ? dit encore tout bas Lucette. Elle releva les innocentes fleurs, les mit sur son lit, où, s’il faut le dire, aucun rêve ne troubla son sommeil ; elle écouta si le vent n’était plus en colère ; elle pensa toute la nuit qu’en effet sa chèvre reverrait avec joie la prairie, et qu’elle avait bien besoin de soleil et d’herbes nouvelles.