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PRIÈRES.

À toi qui peux me dire où, captif et sanglant,
Mon soldat traîne aussi son sort las et brûlant :
Dans quel cachot d’Espagne, à quel ponton d’Écosse
On l’envoya chercher une tombe précoce ;
Et si, par tout ce monde où Dieu me fait errer,
Je reste pour l’attendre, ou bien pour le pleurer !

C’est pour lui que j’étreins ta grande croix latine ;
Que je regarde en haut la coupole Sixtine,
Avec le saint effroi qui saisit un lépreux,
S’il a vu trop d’éclat dans son sort ténébreux :
Car je n’ai pas compris ce qu’il faut bien comprendre.
Trop seule pour rester, trop lasse pour apprendre,
Ton passé me tûrait par ses grandes rumeurs ;
Mais je demande à vivre enfin, car je me meurs.

Rome ! je veux l’amour avec toutes ses larmes,
Avec son innocence, avec ses saintes armes ;
C’est bien plus que toi, Rome, où je passe à genoux,
Disant à la Madone : Ayez pitié de nous !