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simple et fortuné génie. On se laisserait aller au charme de la lecture si l’on pouvait séparer votre saynète attique du nom d’Aristophane, dont elle se réclame. Mais votre Plutus, dans vos espérances à demi dévoilées, s’il ne remplace pas l’œuvre d’Aristophane, vient la compléter, la corriger, la reproduire enfin sous une forme définitive. Votre prologue en plus d’un endroit dénote cette assurance. Par la bouche de Mercure, cet éternel intermédiaire des poëtes aussi bien que des dieux, vous vous félicitez d’avoir suivi dans ses innovations l’exemple de Racine qui des Guêpes transformées fit naître les Plaideurs, de vous être aidée de Lucien pour agrandir le sujet, et surtout « d’a « voir montré Aristophane sous l’aspect sérieux de « son génie ». En un mot, vous croyez, ne vous en défendez pas, amener à la perfection l’œuvre d’Aristophane en l’enrichissant d’éléments qui lui manquaient ou en découvrant dans sa donnée des ressources que le poëte n’en avait pas su tirer, tout comme on ferait rendre des filons inattendus à une mine trop tôt délaissée. Noble confiance, sans doute, mais peut-être excessive dans cette circonstance. Le plus rare génie peut avoir ses illusions. J’essayerai de le prouver, non dans le méprisable dessein de signaler une erreur rachetée par tant de chefs-d’œuvre, mais pour rétablir le caractère de cet autre’génie également cher, de cet Aristophane dont vous avez méconnu l’inspiration, et, avant tout, pour combattre un système que vous patronnez de votre exemple, comme une déesse qui ferait aimer un fléau.