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qu’une poésie de premier jet sous ce ciel enchanteur de la Sicile, au milieu de cette nature où tout est douceur et sérénité.

Ce paysage est un paysage italien, chaud et lumineux, aux grandes lignes, aux contours arrêtés. Le soleil est de flamme et d’or ; il rayonne, il embrase. Mais voici des sources, voici des pins : les ombres et les murmures ne manquent pas. Les chants d’oiseaux ne sont pas rares, et dans tous les bosquets ombreux comme dans les blés ardents résonne la chanson des cigales et des sauterelles, ces musiciennes de l’été. Et parmi ces parfums et ces mélodies, les heureux Siciliens jouissent d’une nature indulgente ; ils aiment ce soleil, ces eaux courantes, ces feuillages, et ils se sentent aimés d’eux. Lierre rose ou égile, toutes les floraisons leur sourient. Chênes, oliviers ou tamaris, tous les arbres les protégent, et dans ce bonheur de vivre l’amour leur vient au cœur comme le rêve d’une nonchalante ivresse

« Je chanterai sous l’antre ente tenant dans mes bras et regardant les troupeaux qui s’en vont paissant sur les bords de la mer de Sicile. » Poésie sensuelle et mélancolique, a bien dit Michelet, auquel nous empruntons la traduction de ces derniers vers.

Ce rêve dure encore, car un ciel aussi transparent illumine Sorrente et Catane, et dans les vallons parfumés murmure toujours le lointain écho dela flûte syracusaine. Et les amoureuses que Musset nous a fait entrevoir dans ses strophes sur Ischia sont bien les jeunes sœurs de cette Galathée de Théocrite qui, coquette et fantasque, jette une pomme au Cyclope pendant qu’il