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qui nous lie à l’auteur de Calendal nous fait de la franchise le plus délicat comme le plus impérieux des devoirs ; c’est aux faibles et aux talents médiocres qu’est destinée la complaisance : la sévérité est faite pour les forts.

Au reste, pour examiner ce poëme comme pour toute autre enquête littéraire, il est deux points d’observation que l’on peut alternativement adopter, et selon lesquels notre vue des choses change singulièrement. Faut-il juger une œuvre uniquement par rapport aux œuvres contemporaines analogues, ou d’après les monuments que dans le même genre nous a transmis le passé ? Cela revient à dire : « Faut-il seulement discerner les beautés neuves et vraies dans une œuvre d’art, ou, avant tout, la rapprocher des types de la perfection ? » Nous croyons que ces deux modes d’examen doivent être successivement employés, mais en commençant par le second, plus honorable pour celui que l’on juge ainsi à la mesure des grands maîtres.

Et d’abord, que veut être Calendal ? Un poëme, nous dit le titre. Au fond, une épopée, ou, si l’auteur retire ce mot, un récit épique. Calendal, dans la conception du poëte, doit être mieux qu’un simple roman. Ce serait un beau roman en vers que nous ne nous plaindrions pas. Jocelyn, certains poëmes de Tennyson, ne visent pas plus haut et n’en sont pas amoindris. Qui de nous regretterait de voir ennoblies par la forme supérieure et l’excellence de la vraie poésie les fictions les plus pures de George Sand ? Calendal, en tant que poëme romanesque, approcherait de la perfection : mais c’est