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le châtiment des tyrans impies, la délivrance des hommes opprimés sous cette double épouvante. Ce n’était pas l’œuvre d’un jour. Aussi mes victoires ontelles été nommées des travaux. Les dieux anciens, dites-vous, ont dépensé moins de peine et de temps pour leurs ouvrages héroïques. Comparez le nombre de ces ouvrages avec les miens ; comparez aussi leur importance. Ils ont fait facilement peu de chose ; j’ai fait beaucoup avec une facilité presque égale. Sous quel prétexte donc et par quelle mauvaise querelle me donnez-vous le titre d’étranger et de parvenu ? »

Ainsi eût pu parler le bon Hercule ; si les hommes de nos jours l’avaient entendu, soyez sûrqu’ils auraient applaudi leur antique bienfaiteur et l’eussent proclamé plus digne du nom de dieu que ces Apollon et ces Mars qui, comme Almaviva, doivent tout à leur naissance, rien à leur volonté. Redescendons de l’Olympe dans le domaine de l’art. Ici, pour nous autres modernes, quoi que vous en disiez, cher maître, les vrais dieux ne sont plus ceux que vous présentez à notre admiration. Qu’ils soient de la race des dieux, personne ne le nie : ils nous font sentir, rien qu’en se montrant, leurs vertus célestes ; mais à la longue ils nous en dégoûtent en nous imposant comme de droit divin leurs faiblesses, leurs négligences, leurs défauts ; ils cessent de nous plaire parce qu’ils ne cherchent pas constamment à nous plaire. Nos dieux préférés sont également des immortels de naissance, mais qui ne se sont pas contentés des dons attachés à leur berceau ; ils avaient en eux le bien ; ils se sont mis à la