Page:Delly - Les deux fraternités, ed 1981.djvu/72

Cette page a été validée par deux contributeurs.
70
LES DEUX FRATERNITÉS

t’éviter en me disant gentiment : « Fais ce que tu veux, Zélie, je te donne carte blanche. »

— Comptes-y ! fit furieusement Morand en versant une bonne dose d’alcool dans sa tasse de café. Et si tu continues à m’ennuyer, tu n’auras plus un sou, entends-tu ?

La menace ne parut aucunement émouvoir Zélie. Elle répliqua avec un petit sourire narquois :

— J’aurai toujours ma dot, ça me suffira pour le moment. Allons, tais-toi ! ajouta-t-elle impérieusement en voyant que son mari ouvrait la bouche pour riposter encore. Ce n’est pas la peine d’ennuyer Prosper avec ces histoires pendant les quelques heures qu’il passe avec nous.

— Ah ! non, vous savez, je n’aime pas les disputes ! déclara Prosper. Arrangez-vous comme vous voudrez quand vous êtes seuls, mais laissez-moi la paix !

— Oui, oui, tout te réussit à toi, tu es libre, tranquille ! marmotta Morand avec un coup d’œil envieux.

Il avala son café, s’essuya rageusement la moustache et se leva en disant d’un ton rogue :

— Je vais chez Muret. Je serai sans doute rentré avant que tu t’en ailles, Louviers ?

— Oh ! je ne partirai pas avant cinq heures !

— Bon, je serai là.

— Prends-tu l’auto, Jules ? demanda Zélie.

Il répondit par un signe de tête affirmatif.

— C’est amusant ! Moi qui avais des visites à