Page:Delly - Les deux fraternités, ed 1981.djvu/241

Cette page a été validée par deux contributeurs.
239
LES DEUX FRATERNITÉS

asseoir là-bas et ne vous occupez pas de ce que dit ce pauvre Prosper qui n’a déjà plus ses idées.

Elle jeta un coup d’œil vers la porte qui communiquait avec la pièce voisine, mais le personnage à la barbe grise s’était placé devant comme une sentinelle.

— C’est odieux ! s’écria-t-elle avec indignation. Je suis sûre que si son fils était là, il me laisserait obéir au dernier désir de son malheureux père !

Morand eut un ricanement.

— Il serait peut-être assez bête pour ça ! Mais il ne peut pas bouger, c’est moi qui commande ici. Tâchez de vous taire maintenant, tout ce que vous pourrez me raconter ne changera rien à la chose. Prosper a vécu en ennemi de votre religion, il mourra de même, et moi aussi.

Navrée, mais comprenant qu’elle ne vaincrait pas l’épouvantable résolution de ce sectaire, Micheline s’assit près du mourant. Et, pendant une demi-heure, elle assista à sa terrible agonie, qu’adoucissaient seuls les encouragements, les prières murmurées à son oreille par la veuve de Cyprien, malgré les grossiers sarcasmes de Morand et de son compagnon. De temps à autre, la même supplication sortait des lèvres desséchées de Prosper.

— Un prêtre !

Et Micheline disait :

— Demandez pardon à Dieu. Si votre repentir est sincère, il peut malgré tout vous sauver.

Il eut tout à coup un spasme violent. Miche-