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LES DEUX FRATERNITÉS

heur pendant la vie, et après la mort, plus rien ! »

Durant ses longues nuits sans sommeil, de pénibles pensées traversaient son cerveau fatigué, un tranquille désespoir s’infiltrait peu à peu en elle, elle s’abandonnait avec une sorte de bonheur à la faiblesse envahissante.

Un après-midi, au retour de sa promenade qu’elle raccourcissait chaque jour, elle eut un violent étourdissement à une centaine de mètres de la villa, et serait tombée si un officier qui passait n’avait étendu la main pour la retenir.

Quand elle reprit conscience de ce qui l’entourait, elle reconnut le lieutenant de dragons aperçu un jour dans le jardin voisin de la villa Laetitia. Près de lui se tenait un tout jeune prêtre — un séminariste plutôt — qui avait avec lui une certaine ressemblance.

— Je vous demande pardon ! dit Claudine en rougissant. J’ai eu un étourdissement, mais c’est passé, je vous remercie, monsieur.

— Mais je suis trop heureux de m’être trouvé là, dit courtoisement l’officier en saluant.

Claudine fit quelques pas, mais elle chancela de nouveau et étendit la main pour se retenir à la grille du jardin qu’elle longeait.

L’officier, qui était resté discrètement en arrière avec son compagnon, s’avança vivement.

— Si j’osais vous prier d’accepter mon bras jusque chez vous, madame ? dit-il respectueusement.