Page:Delly - Les deux fraternités, ed 1981.djvu/134

Cette page a été validée par deux contributeurs.
132
LES DEUX FRATERNITÉS

son grand désespoir ; elle ne pouvait réussir, malgré tous ses soins, à dissimuler entièrement l’irréparable outrage des années. Mais elle demeurait élégante comme autrefois, et toujours assoiffée de luxe, de fêtes, de plaisirs. Elle passait une partie de la semaine à Paris, fort heureusement pour Claudine, qui n’éprouvait déjà que trop souvent les effets du caractère peu facile de la sœur de Prosper, jalouse de la jeunesse et de la beauté de la pupille du député.

À l’entrée de Claudine, Louviers se détourna brusquement, et elle vit, à l’expression de sa physionomie, qu’il y avait de l’orage dans l’air.

— Ah ! voilà mademoiselle la discoureuse ! dit-il d’un ton sarcastique. Il paraît, mademoiselle Claudine, que vous énoncez des opinions subversives, que vous défendez les curés, que vous vous permettez de blâmer votre tuteur ?

— J’ai dit, père, qu’il était inutile de lui parler de cela ! interrompit la voix irritée d’Alexis.

Les sourcils du jeune homme se rapprochèrent violemment, une émotion pénible s’exprima dans le regard qu’il posait sur Claudine, très pâle, mais ferme dans l’attente de l’assaut.

— Mais si, mon cher enfant, il faut tirer cela au clair, savoir les idées que cette jeune personne se permet d’avoir.

— Cela me regarde, je m’en charge ! dit froidement Alexis. Nous arrangerons cela, elle et moi. Déjeunons vite, père, j’ai un peu faim, aujourd’hui.

Sans discuter davantage, le député s’assit en