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LES DEUX FRATERNITÉS

personne en question demeurant dans la maison en face de la mienne. Elle a trois petits enfants et est veuve d’un nommé Cyprien Mariey, une espèce de calotin, ouvrier électricien qui s’est fait tuer par les camarades dans la grève de l’année dernière, parce qu’il prétendait travailler quand même…


« Ce misérable Cyprien, qui a essayé de me faire le coup il y a un an, en compagnie de son marquis ! » murmura Prosper d’un ton de ressentiment haineux.

Il acheva de lire les renseignements qui suivaient, puis, posant la lettre sur son bureau, il alluma un cigare et se mit à marcher de long en large dans la pièce.

« Bah ! pourquoi pas ? murmura-t-il tout à coup. Ça ne ferait pas mal que je me remarie, maintenant que Zélie a trouvé l’époux de ses rêves. Et je puis désormais me payer le luxe d’une femme pauvre. Avec ça que j’obtiendrai un effet magnifique près de mes chers électeurs, quand ils sauront que j’épouse une humble ouvrière, et que je me charge en plus de ses trois enfants ! Si ce n’est pas de l’héroïsme pur, ça ! Bonheur et profit, je trouverai ainsi tout en même temps. Et maintenant, je n’aurai plus à me préoccuper de lui faire passer ses idées de dévotion ; je suis arrivé désormais, la chose ne me gênera plus, pourvu qu’elle n’exagère pas. La femme de Dulac va à la messe ; Potrel, le