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LA PETITE CHANOINESSE

matin. Les bois, dégagés de la brume, apparaissaient étalés au flanc des hauteurs. Un parfum d’herbe fraîche, de terre humide venait des prés bordant la rivière… L’agreste beauté de ce paysage, la lumière un peu voilée de cette matinée plurent à Ogier, qui avait l’âme impressionnable d’un artiste, sous ses dehors sceptiques et légers. Il se sentait beaucoup mieux disposé, tout à coup, pour les gens et les choses de Gouxy… Puis il y avait l’intéressante petite châtelaine, condamnée au célibat, et dont la beauté l’avait très vivement frappé. Il songeait, tout en avançant d’un pas machinal : « De quelle couleur sont ses yeux ?… Ils m’ont paru bleus, mais très foncés… Oui, ils doivent être bleus. C’est ce qui donne tant de charme à cette physionomie, que je n’ai pu qu’entrevoir encore… Assistera-t-elle au déjeuner ? La grand’tante ne le permettra sans doute pas… Je le voudrais cependant, car ce me serait une occasion de bien la voir. ».

Dans la petite église un peu sombre, le cercueil fut déposé entre les cierges, sur un tréteau. Ogier se trouvait seul au premier rang, du côté des hommes. De l’autre avaient pris place les trois chanoinesses. En tournant un peu la tête, M. de Chancenay voyait le ferme profil de Mme Antoinette, son buste corpulent, qui lui