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L’ONDINE DE CAPDEUILLES


griffes redoutables. C’est pourquoi vous ne les avez pas vus encore.

— J’espère bien que vous ne me les montrerez jamais !… En tout cas, je sais ce que vous avez fait pour une cousine presque inconnue. Et je suis bien sûre que vous avez beaucoup aimé votre frère.

Le regard d’Odon étincela d’une émotion soudaine, très fugitive.

— Il a été ma seule affection.

— Alors, vous avez beaucoup souffert, quand il vous à quitté ?

— Oui, beaucoup.

Elle dit avec une douceur profonde :

— Pauvre Odon !

Il eut un frémissement léger : « Pauvre Odon. » Personne ne lui avait jamais dit ce mot de compassion, même au moment de son malheur. En le voyant hautain, sans larmes, près de la dépouille mortelle de son frère, nul n’avait songé qu’il pût souffrir atrocement de cette séparation, de ce brisement d’une tendresse fraternelle qu’on ne soupçonnait pas aussi vive, car il ne la montrait pas au dehors. Mais cette enfant l’avait devinée, avec l’intuition d’un cœur aimant, et la première, la seule, elle le plaignait, affectueusement.