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L’ORPHELINE DE TI-CARREC

et sur l’écran imaginaire défilaient tous ceux qui avaient été les témoins de ses années d’enfance.

En gros plan, sa maman tant aimée, Varvara, enlevée trop tôt à son amour par une mort demeurée mystérieuse. Gwen était persuadée que la pauvre femme avait été la victime innocente d’un empoisonnement criminel et souvent elle avait eu le désir de retrouver la main coupable. Aujourd’hui, dans l’euphorie de son bonheur tout neuf, elle ne voulait avoir que des élans d’amour et elle rejetait toutes ses pensées de vengeance. À quoi bon d’ailleurs ? Plus tard, peut-être.

Elle revoyait aussi la petite maison de Ti-Carrec, la chambre de Varvara, la boiserie à secret, la cachette et le coffret à bijoux. Bijoux bien modestes si elle les comparait à ceux dont son mari l’avait comblée depuis quelques jours, mais dont la valeur de souvenir était, à ses yeux, inestimable. Et Gwen se disait que lors du voyage en France que son mari venait de lui annoncer, elle irait les prendre et qu’elle les conserverait toujours, derniers et seuls vestiges de sa vie d’Européenne devenue princesse d’Orient.

À sa maman, succédèrent sur l’écran les Dourzen : la méchante Blanche, l’insignifiant Hervé, les cruelles Rose et Laurette. Eux ne méritaient que l’oubli, que l’enlisement dans leur médiocrité dont rien ne pourrait les sortir, le mariage de Gwen, qu’ils ignoraient mais