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L’ORPHELINE DE TI-CARREC

— Je saurais les museler s’ils s’avisaient de nous chercher noise. N’ayez aucune crainte de ce côté, Gwen. Oubliez toute votre enfance malheureuse, oubliez cette famille d’êtres avides, jaloux, ambitieux, qui n’a pas vu en vous une orpheline à consoler, mais une servante à exploiter. Effacez d’un trait de plume les années qui se sont écoulées depuis la mort mystérieuse de votre maman. Moi, je vous ferai une existence digne de votre beauté, charmante Cendrillon qui m’avez fui en cette nuit de fête, à Kermazenc… Après cela, je ne voulus plus retourner parmi nos hôtes, car vous m’aviez trop vivement intéressé pour que je fusse capable de trouver autre chose qu’insipidité près de la plus séduisante de mes invitées.

Gwen écoutait les paroles enchanteresses en frémissant d’émoi et d’obscur orgueil. Dans les yeux noirs, en ce moment d’une douceur veloutée, passaient des lueurs ardentes qui l’éblouissaient. Dougual lui parlait maintenant des pays qu’il lui ferait connaître ; il lui disait :

— Votre intelligence, que je sens si vive, votre nature si vibrante, jouiront de tous les spectacles de la nature, de toutes les manifestations de la pensée dans le monde. Cette intelligence, ce cœur, je veux en être l’initiateur, en quelque sorte. Mlle Herminie Dourzen a préparé le terrain, mais il peut être magnifiquement cultivé, maintenant, et je