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yeux sombres, allongés par une habile peinture.

— … Je sais tout ce que je dois à Ivor, pour moi et pour Dougual, je ne l’oublierai jamais.

La comtesse laissa passer un petit temps de silence, puis demanda, sur le même ton de calme froideur :

— Dougual quitte-t-il aussi bientôt Kermazenc ?

— Avant nous, probablement. Il se rend directement à Pavala. Sans doute le verrez-vous avant son départ ?

— S’il lui plaît de le vouloir, oui.

Sur cette brève réponse, la comtesse inclina légèrement la tête pour saluer Appadjy et reprit sa route, d’une lente allure, la main toujours posée sur le bras de Sanda.

Le brahmane la regarda s’éloigner. Il songeait en hochant la tête :

« Celle-là est aussi mystérieuse que Dougual !… Son amour pour Ivor fut autrefois comme une lave brûlante, qui emportait tout. A-t-il résisté aux épreuves dont cet homme l’accabla ? L’ardente lave est-elle figée, ou bien seulement contenue sous cette apparence impassible ? Ivor, lui, se croit toujours fanatiquement aimé… comme autrefois, quand elle aurait bravé ciel et terre pour lui plaire, pour qu’il ne la délaissât pas. »

Le brahmane eut un petit rire sourd, en achevant à mi-voix :

« Je sais ce qu’elle a risqué pour cela. »