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faisait un rempart contre la méchanceté des uns, la méfiance et la prévention des autres, méfiance et prévention savamment entretenues par Blanche et ses filles.

Quelqu’un, pourtant, s’était intéressé à l’enfant dédaignée. Depuis huit ans, presque chaque soir, quand tous étaient couchés, Gwen se glissait hors de son galetas et se rendait chez Mlle Herminie. Celle-ci lui donnait des leçons de littérature, de sciences, de dessin, de musique. Elle était fort instruite, bien douée au point de vue artistique, et avait en outre beaucoup voyagé. En Gwen, elle trouvait une élève de choix.

Pour une femme intelligente, c’était un plaisir délicat de cultiver ce jeune esprit, vif et profond à la fois, de mettre en valeur des dons intellectuels remarquables que la volonté de Mme Dourzen eût laissés dans l’obscurité. Aujourd’hui, à dix-huit ans, Gwen possédait une instruction étendue, parlait trois langues étrangères, exécutait avec une rare compréhension les œuvres de Mozart, de Beethoven, de Bach, et peignait l’aquarelle en véritable artiste.

Le temps de toutes ces leçons était pris sur les nuits. Elle avait heureusement, sous une apparence plutôt frêle, un tempérament d’une singulière résistance. Puis Mlle Herminie lui faisait servir des mets réconfortants, lui achetait des reconstituants que l’enfant avalait en cachette. Ainsi, tout en travaillant le jour pour