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— Pourquoi pleurait-elle ?…

Alix se pencha vers elle… Allait-elle donc connaître par cette bouche inconsciente le secret tant désiré ?

— Peut-être lui avait-on fait du mal, grand-mère ?

— Oui, peut-être… Je ne sais plus…

Et, sans doute lasse de chercher ce souvenir qui la fuyait, elle s’assit dans un fauteuil près du piano… Au même moment apparaissait Mathurine, le visage bouleversé par une vive émotion.

— Oh ! mademoiselle, quel effet cela m’a produit en vous entendant ! Je n’y suis plus habituée depuis longtemps…

— Depuis que maman était partie, Mathurine ?…

— Non, mademoiselle, pas tout à fait : M. Even jouait souvent à cette époque.

— Et maintenant ?…

La physionomie de Mathurine s’assombrit instantanément.

— Oh ! maintenant, jamais ! Le piano a été vendu…

— De la musique… encore ! interrompit la voix plaintive de Mme de Regbrenz.

— Ah ! pauvre dame, elle l’aimait tant !… Et le Comte, donc ! Mlle Georgina était la seule de la famille qui ne pût souffrir un instrument quelconque. Aussitôt que Mlle Gaétane ou M. Even se mettaient au piano, elle montait dans sa chambre.

— Mathurine, pourquoi mon oncle est-il si étrange ?… Car il n’était pas ainsi, autrefois, n’est-ce pas ? demanda Alix tout en s’avançant vers le piano.

La servante se détourna et feignit de regarder un objet sur la table… mais ses mains frémissantes témoignaient de son agitation.

— Non, il n’était pas tout à fait ainsi, dit-elle