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renaître, car le court moment passé dans ce souterrain glacial lui avait causé un inexprimable malaise.

— Pourquoi donc fait-il un tel froid là-dessous ? demanda-t-elle à Mathurine qui attisait le feu.

— On prétend que cela tient au terrain, mademoiselle. C’est là que la comtesse Anne accomplissait ses sortilèges. Aujourd’hui encore, on dirait qu’elle attire les petits innocents… Ah ! maudite, tu voudrais les tuer tous ! gémit-elle en tordant ses mains maigres.

— Une demeure comme la nôtre n’est pas faite pour abriter des enfants… Ils ne peuvent y trouver que le malheur, dit Even d’un air sombre. Comment cela est-il arrivé ?

En quelques mots, Alix lui expliqua l’aventure de Xavier. L’enfant, échappé à la surveillance de Mathurine, s’était probablement glissé dans les salles inhabitées, puis, de là, dans la tour, et, le mystère exerçant sur lui un invincible attrait, il était descendu jusqu’à ce souterrain, dont la porte s’était refermée sur lui. Sans doute il avait crié, appelé, mais, peu à peu, le froid l’avait saisi et il s’était couché au bord de l’oubliette… En mentionnant ce détail, la pauvre Alix eut un long frisson et, sur l’impassible visage d’Even, passa une rapide émotion.

— Comment cette porte se trouvait-elle ouverte ? interrogea-t-il.

— Je ne sais pas, monsieur… Voyez-vous, il y a des choses étranges… et terribles, dans cette tour…

Mathurine parlait d’une voix toute changée, en se retournant légèrement pour que son maître ne vît pas son visage altéré.

— Cela ne m’explique rien, dit Even avec impatience.