Page:Delatour - Adam Smith sa vie, ses travaux, ses doctrines.djvu/319

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

même l’espoir d’aucune reproduction future. À la vérité, en retour du capital par eux avancé, ils ont obtenu une annuité dans les fonds publics, qui le plus souvent valait au moins autant. Sans contredit, cette annuité leur a remplacé leur capital et les a mis en état de faire aller leur commerce et leurs affaires avec tout autant et peut-être plus d’étendue qu’auparavant, c’est-à dire qu’ils se sont trouvés à même d’emprunter à des tiers un nouveau capital sur le crédit de cette annuité, ou bien, en la vendant, de retirer de quelque tierce personne un autre capital à elle appartenant, égal ou supérieur à celui qu’ils avaient avancé au gouvernement. Mais ce nouveau capital qu’ils ont acheté ou emprunté à de tierces personnes, il fallait bien qu’il existât dans le pays auparavant, et qu’il y fût déjà employé, comme le sont tous les capitaux, à entretenir du travail productif. Quand ce capital est venu à passer dans les mains de ceux qui avaient avancé leur argent au gouvernement, s’il était pour eux, à certains égards, un nouveau capital, il n’en était pas un nouveau pour le pays ; ce n’était autre chose qu’un capital retiré de certains emplois particuliers pour être tourné vers d’autres. Bien qu’il remplaçât pour eux ce qu’ils avaient avancé au gouvernement, il ne le remplaçait pas pour le pays. S’ils n’eussent point fourni leur capital au gouvernement, il y aurait eu alors dans le pays deux capitaux au lieu d’un, deux portions du produit annuel au lieu d’une, employées à entretenir du travail productif. »

Cette erreur venait de ce que Pinto prenait à la lettre l’expression vulgaire désignant généralement sous le nom de capitaux la masse des titres qui constatent les droits des prêteurs et qui ne sont au contraire, dans la réalité, que de véritables hypothèques grevant l’ensemble du patrimoine national dont elles diminuent d’autant la valeur.

Quant à l’erreur de Melon, Adam Smith la considère seulement comme une conséquence du système mercantile qui n’admet pas qu’il y ait perte tant que la même quantité d’argent reste dans le pays. Aussi se plaît-il à la combattre en se plaçant au point de vue même de ce système et il fait remarquer que, de la sorte, cette proposition ne serait encore admissible que si l’on supposait tous nos emprunts souscrits par nos